Recto
. 17 Octobre 1918
. Ma Jeannot chérie
. Décidément je suis inquiet. Je n’ais en-
core rien reçu de toi aujourd’hui. Est-ce un
retard de la poste, ou bien serais-tu malade ?
Je souhaite et j’espère que ça n’est pas, car
en ce moment ce serait réellement dan-
gereux. Méfie-toi de la grippe car dans la po-
sition où tu te trouve ce serait cruel.
Soigne-toi … méfie-toi … Si ta mère était
atteinte par cette maladie il faudrait
qu’elle soit soignée par une autre personne
que toi. C’est dure ! mais il faut te dire
que ta vie serait réellement en danger.
Une femme enceinte ne résiste pas beaucoup.
Evite la contagion, évite les foules. Il te faut
de l’air mais de l’air sain … Ne néglige au-
cune précaution … Je ne suis pas tranquil
du tout … il me tarde de te lire et d’avoir
de vos nouvelles à tous … Comment va ta
mère ? Comment va mon père ? …
. Pour moi la santé ne va pas trop
mal, quoique je ne sois pas des plus cos-
taud. J’ais pourtant assez bon appétit. Il
est vrai que ce n’est pas ici que je puis
bien prendre des forces.
. Je devais partir demain soir pour Mont-
brison, mais si ce qu’on vient de dire est vrai
les permissions seraient suspendues pour
Verso
20 jours ce qui fait que nous ne pourrions pas
partir pour 10 jours car c’est considéré comme
permission. Que va-t-il advenir ? … Va-t-on
passer à la commission pour avoir 15 jours
ce qui nous permettrait de partir … mais alors
il faudrait attendre jeudi pour passer à cette
commission. Ou bien alors va-t-on nous ren-
voyer au dépôt divisionnaire directement, sans
perme, sans convalo ? Ça ne serait pas rigo-
lo … A moins que ce bruit ne soit qu’un
canard. On ne sait rien de précis encore
Attendons ! Tout de même … Ça serait rude-
ment con si la convalo me passait devant
le nez. Moi qui pensait vous revoir bientôt
et d’être près de toi au moment critique.
Enfin … espérons que demain nous pourrons
prendre le train … moi pour Montbrison.
J’attends impatiemment.
. Au revoir Mamour. Je ne t’écris
pas plus longuement pour aujourd’hui
J’espère que demain je pourrai te lire et
que j’aurai de vos bonnes nouvelles à tous
. Embrasse bien fort notre gentille
Zizou pour son papa et donne bien le
bonjour à ta mère, à chez moi à toute
la famille.
. Ton petit mari très impatient de te
revoir et qui t’envoi ses plus douces caresses
et qui t’embrasse bien fort comme pen-
dant la perme. Souviens-toi ! … Je t’adore
et j’attends.
. Simon Collay
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