Nous avons vu, à travers toute cette correspondance, que les 4 frères Collay avaient participé à la guerre et qu’ils se donnaient ou prenaient de leurs nouvelles : directement ou par l’intermédiaire de leurs épouses …
Voici, pour chacun, une courte synthèse de leur parcours, à partir des fiches militaires. On constate que le jour où ils pourraient s’asseoir tous à une même table n’est pas encore venu…
JOANNY : né le 3 mars 1891, il a 3 ans de moins que Simon. Il est ajourné en 1912 pour « faiblesse, othorrée *». Il repasse donc tous les ans devant le conseil de révision : exempté en 1913 pour « perforation de tympan avec suppuration chronique » puis de nouveau le 9 septembre 1914 pour « otite suppurée » Il se marie le 11 août 1916 avec Claudia Girard, « la Claudia » des lettres de Jeanne…Une petite fille nait à la fin de l’année, une autre arrivera au cours de l’année 1917.
En 1917, il semble que l’on soit moins regardant sur ses problèmes de santé et il est incorporé et arrive au 113ème régiment d’artillerie lourde le 24 mai. Il intègre par la suite, nous n’avons pas la date, la 13ème section d’infirmiers militaires. Son métier de typographe ne semblait pas le prédestiner à ce rôle, mais il y reste jusqu’à la fin de la guerre et même au-delà puisqu’il est réserviste dans ce type d’emploi.
Il est affecté « aux armées » du 24 mai 1917 au 11 mai 1918. Il passe « à l’intérieur » du 12 mai au 19 mars 1919 et repart « aux armées » du 20 mars au 30 juillet 1919, sans doute en Allemagne ou au moins à la frontière. Il est donc démobilisé 4 mois après son frère ainé.
On lui affecte une invalidité de 15 %, non imputable (sans indemnité sans doute) pour « hyperacousie diotique **» le 23 août 1928.
Il réside à Montbrison.
LOUIS : né le 14 janvier 1894, il a tout juste 19 ans quand il s’engage pour trois ans dans le 2ème groupe aéronautique. Il y est noté comme ajusteur de précision. En novembre, il part de Bordeaux pour le Maroc et le parc aéronautique n°7, à Casablanca. Il y reste jusqu’au 1er mai 1915. Il intègre alors le 2ème groupe d’aviation, en France. Il aura plusieurs affectations, passant d’un parc à l’autre avec la fonction de mécanicien. On a peu de précision sur les localisations, on sait qu’il est à Luxeuil en février 1917.
Il se marie le 25 octobre 1916 avec Jeanne Louise Vabre, de Montbrison, un fils nait au cours de l’année 1917. Il y a donc, dès ce moment, une deuxième Jeanne Collay dans la famille.
Il est évacué pour maladie, sans autre précision, le 2 février 1919 et réformé par la commission de Saint Etienne le 16 juillet de la même année.
Il reçoit la médaille interalliée le 7 juin 1935.
Il s’engage le 1er juillet 1942 au réseau Brutus des FFC comme agent P2 comme chargé de mission avec le grade correspondant à adjudant. Il est libéré de cet engagement le 30 septembre 1944.
Dès le lendemain il s’engage pour la durée de la guerre comme « adjudant mécanicien avion » à l’aviation des Alpes (groupe 1/35), il y reste jusqu’au 15 mars 1946, il est alors démobilisé et versé dans la réserve comme 2ème classe.
Il reçoit la Croix du combattant volontaire 1939-1945 en janvier 1958 et la médaille militaire le 5 janvier 1960.
GEORGES : Né le 23 octobre 1896 sous le prénom de Marius. Ce prénom était également le deuxième prénom de Louis. Nous ignorons la cause et la date du changement de prénom usuel. Il est ajourné en 1915 mais il n’est pas indiqué de raison. Il est incorporé au 17ème régiment d’infanterie en août 1916, il suit sans doute une période d’instruction dans le midi de la France jusqu’à la mi-janvier 1917, le régiment est basé à Béziers…Il passe au 158ème en janvier 17 puis au 46ème bataillon de chasseurs et enfin au 8ème du génie en mars 1918. Quelques jours après son affectation à ce régiment il est déclaré déserteur. On ne sait ce qu’il s’est passé dans le détail, cet état lui est reproché du 22 mars au 13 avril. Il faut rappeler que la désertion en temps de guerre est punissable de la peine de mort. Les choses se sont arrangées puisqu’il est rayé des contrôles de la désertion le 13 avril. Il n’empêche que cela reste sur son dossier comme une rupture de 3 semaines où il n’est pas considéré « aux armées »
Le 19 novembre il est cité au régiment « Excellent chasseur, s’est élancé le 23 octobre au matin à l’assaut des positions ennemies avec une bravoure extraordinaire faisant preuve du plus grand mépris du danger » Il obtient la croix de guerre avec étoile d’argent.
Il est démobilisé le 27 septembre 1919.
Il se marie avec Benoite Gourbière le 14 décembre 1920, ils ont eu une fille en 1927
Alors qu’il est déclaré comme coiffeur au conseil de révision, on le retrouve affecté comme agent des lignes de l’administration des postes et télégraphes. Il semble qu’il soit à Bourges le 29 janvier 1926 et il est nommé à Saint Etienne en février de la même année. C’est sans doute à ce titre qu’il est affecté à la télégraphie militaire à Nancy. Il est maintenu au service armé avec une invalidité inférieure à 10% non imputable après un examen pulmonaire négatif à la commission de Saint Etienne du 4 juillet 1929. On se souvient que Simon, dans une de ses dernières lettres faisait allusion au gazage que Georges avait subi.
En février 1939, il est « affecté spécial » au titre de télégraphie militaire de la 17ème région, au recrutement de Toulouse. Il est mobilisé le 10 septembre 1939, au détachement d’ouvrier. Il est cité à l’ordre du régiment le 10 juillet. On précise qu’il est décoré de la croix de guerre avec étoile de bronze. Est-ce un rappel de celle obtenue pendant la 1ère guerre ? Est-ce une 2ème médaille ?
Il est démobilisé le 20 juillet 1940
Il reçoit la médaille militaire en avril 1973.
Les 4 frères Collay sont tous rentrés de cette guerre très meurtrière, sans infirmité marquante, et pour cette famille, c’est une chance assez rare méritant d’être signalée.
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* L’otorrhée est un écoulement de liquide séreux, mucoïde ou purulent provenant du conduit auditif externe, témoin d’une affection de l’oreille, le plus souvent d’origine infectieuse, comme lors d’une otite externe ou d’une otite moyenne avec perforation du tympan.
** L’hyperacousie est une réponse anormalement forte et douloureuse du système auditif au bruit et aux sons. Diotique : Se dit d’une stimulation égale ou d’une sensation auditive identique pour chacune des deux oreilles.
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