Recto
. Moingt le 25 juin 1918
. Mardi
. Mon bien cher Simon
J’ai reçu aujourd’hui une
lettre de toi qui est de
Juin mais pas de date
Où tu me dis que tu
as la pluie C’est rudement
embêtant pour toi qui
es dehors. Comme tu dois
être au frais. Ça doit de
raidir les membres. Quand
donc que ça finira et
que tu seras enfin tranquil
Et que tu pourras vivre
comme nous Ce n’est pas
une vie ce commerce
Centre gauche
A propos a ce que je t’ais
dit pour le vin de la
coopé Je m’aperçois que
tu ne lis pas mes lettres
avec beaucoup d’attention
pour me parler comme tu
me parle Et il ne faut pas
sortir de St Cyr pour com-
prendre que si ton père
revend le vin de la coopé
c’est ce que je t’ai dis que
je croyais quoique je n’en
sois pas certaine encore
Je ne m’en suis pas occuper
d’ailleurs. Ça se sauras surement
« tout s’évente » Donc ce
n’est guère engageant. Et
puis il se figures sans doute
que je vais faire le tour a
Champdieu pour m’en aller
le soir. Je suis obliger de
Centre droit
porter le livret et de le retourner chercher
Je ne suis pas un cheval pour
temp courir. Et encore moins leur
domestique. Quand je serais malade
se seras encore a ma mère a
avoir tout l’embarras. Et eux
resterons bien tranquils sans ce
soucier s’il j’ai seulement de quoi
me soigner. Comme c’est déja
arriver. D’où le meilleur et de
rester chez sois. Et puis la coopé
donne un litre de vin par jour par
personne. Donc il y en a bien
assez Et s’il en prends davantage
ce n’est pas pour le plaisir de
mettre en conserve Ne parle pas
de s’entre-aider Car la fraternité
est morte. Je crois bien que je
pourrais avoir besoin que je
n’ai a compter ni sur la famille
ni d’un côté ni de l’autre J’aimerais
mieux crever que de demander quelque
Verso
chose a quelqu’un. Ça ce connait que
tu vis loin du monde.
Quand au Américains je ne crois pas
qu’il en vienne On a remis les choses
telles qu’elles étaient avant. Douteras
tu donc en me disant « Méfie-toi »
Je n’ai pas a me méfier Il peut
en venir tant qu’il en voudra pourvu
qu’ils ne me gêne pas C’est le
moindre des mes soucis J’ai assez
de quoi penser et a faire sans courir
après les Américains Quand a être
moches. Je ne puis te dire Car je n’en
ai vu qu’un ma foi il n’était
pas plus moche qu’un autre Il
marquait mieux que les Boches
en tout cas. Mais je n’a nullement
penser a en faire la conquête quoique
comme tu le dis il avait l’air de
regarder les femmes en amateur. Mais
tout ça ne me touche guère. La fin
de tout ce commerce ferais bien mieux
mon affaire qu’un Américain. Vivement
la fin et chacun chez sois. Ne
parlons plus de ça J’ai assez de
mon mal pour m’ennuyer mes
doigts en sont tous crevasser je patis
beaucoup pour travailler ça me
fait mal jusque dans le coude
pour comble c’est le bras droit
Je ne puis ouvrir la main qu’a
moitié. Aussi je boufferais tout
monde Tu devrais te dépêcher
de venir Je te passerais ma mauvaise grace
après. Puis je ne travaillerais pas
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( en haut à l’endroit) :
Ça passerais sans doute
plus vite Je suis obliger de
m’arêter car la place
me manque
pour écrire
Zizou est toujours
en bonne santé
Je t’envoie une
bise pour elle
Au revoir Mon
Simon a
demain toujours
de tes bonnes
nouvelles.
Ta Nonot qui
ne cesse de penser
a toi te bises
bien fort sur
ta bouche comme je
t’aime Mille grosses caresses
mes plus doux baisers
Ta petite femme tout a toi Jann
( de côté à droite) :
Mille grosses bises ton z’yeux
( de côté a gauche)
Quand penses-tu venir Je ne
songe qu’a ça Le temp me dure de te revoir
( entre Mon bien Cher Simon et le corps de la lettre, à l’envers)
Le temp ici est bizarre ce Soir
J’ai peur de l’orage de la grêle du moins
Car ce serais dommage pour la vigne
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