25 Mai 1918
. Ma petite fenotte chérie
. Je viens de lire à l’instant tes deux lettres du 20 et 21 courant : la correspondance
marche bien mal. Il me tardait d’avoir de tes nouvelles, malheureusement celles que je viens de recevoir
ne sont pas aussi satisfaisantes que je l’aurais souhaité. Tu es fatiguée et ta santé laisse à désirer ; cela m’in-
quiète, j’ais peur que tu te tombes réellement malade. Soigne-toi, soigne-toi sérieusement, s’il te faut du repos prends
le et n’attends pas pour cela que la maladie t’y force. Il ne manquerait plus que tu sois obligée de t’aliter, ce serait
le comble. Tu me dis que le pain est très mauvais et vous ne touchez plus que la ration. Je crois bien que nous
n’avons rien à envier aux bôches sous ce rapport ; pour peu que ça continue la vie va devenir de plus en plus agréable.
Quelle vie de misère tout de même ! … Et ça n’a pas du tout l’air de vouloir se terminer, c’est à en devenir enragé : il y en a bien
mare pourtant et la Paix serait la bienvenue pour tous. Heureusement que notre Zizou se porte toujours bien elle ; nous
avons cette chance qu’elle ne nous donne aucune inquiétude, elle est diable, elle aime courir, elle est douée d’un bon
tempérament. Ah ! ce que le temps me dure de pouvoir vous rejoindre et de vivre à nouveau heureux près de mes deux
gosses bien-aimées loin desquelles les jours me paraissent d’une longueur interminable. Quand je pense à tout le bonheur
qui pourrait être notre sans cette maudite guerre le présent me semble insupportable et je ressens une haine implacable
pour ceux qui sont les acteurs de cette horrible guerre dont le monde entier se ressent.
. Mamour. Tu me dis que la coopérative va bientôt ouvrir. J’en suis très heureux et j’espère que vous trouverez tout le néces-
saire et à meilleur marché que chez les épiciers. Il me tarde de savoir le résultat. Le vin se vend 26 sous ça fait une grande
différence avec les autres commerçants.
. Tu me dis que la vigne n’est pas laide mais il en manque beaucoup et vous avez bien peur de la grêle car elle a faut du
mal à Pralong. Espérons que nous n’aurons pas encore cette déveine et que la vendange ne sera pas vilaine. Ça ne serait pas malheureux.
. Les soldats qui était à Montbrison et aux environs ont été embarqués par le train. Où les a-t-on emmenés ? Craint-on
quelque chose à St Etienne ? Je doute qu’il y ai quelque chose de sérieux, ça m’étonnerait.
. Aujourd’hui j’ais reçu une carte du Joanny qui m’apprend qu’il est dans une ambulance à 30 km du front. Il se porte
bien et me dit qu’il a pas trop mal débuté, on veut le mettre scribe à l’ambulance. Il me charge bien t’envoyer le bonjour
de sa part et de grosses bises au Zizou.
. Pour moi rien de nouveau depuis hier. Je me porte bien et nous sommes toujours au même patelin.
La journée est sombre et ce matin ça ne faisait pas trop chaud, mais il n’a pas encore tombé d’eau, ça m’étonnerait
que la journée se termine sans qu’il y en est. Ce matin à 6 heures nous nous mettions en route avec la compagnie
pour aller au tir. Nous sommes rentrés il n’était pas loin de 11 heures. En ce moment la compagnie est à nouveau a
l’exercice. Ils ne nous laissent pas inactifs, ils ont trop peur qu’on se rouille. On ne sait toujours rien de précis sur
ce qui nous attend. On doit toujours partir et nous sommes encore-là. Je souhaite que nous y restions le plus longtemps
possible.
. Au revoir Mamie chérie. Embrasse bien fort notre gamine pour son papa qui vous aime bien toutes deux et
vous envoi ses plus douces caresses et bisettes en attendant impatiemment la joie de vous revoir. Bien le bonjour
à ta mère et à toute la famille. Bonne santé et bonne chance à tous et vivement que la Paix nous soit rendue.
. Ton petit mari qui pense à toi constamment et qui t’embrasse bien fort comme pendant la permission
déjà si loin. Je t’adore de tout mon cœur plein de toi, de toutes les forces de mon âme. Avec notre Zizou vous êtes ce
que j’ais de plus cher, vous êtes toute ma vie, toute ma raison d’être. Je vous aime bien … bien. Ne l’oubli jamais
petite Jeannot des bois.
. Ton Simon qui est à toi entièrement et pour toujours. Toutes mes pensées sont pour toi,
tout mon amour, toute ma tendresse je te les réserve. Je n’aime que toi, que toi seule ma bien
chère petite femme. J’attends impatiemment de te relire pour savoir si tu vas mieux, je suis inquiet
de te savoir mall malade.
. Simon Collay
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