Recto
. 27 novembre 1915
( en haut à gauche en diagonale :
Je te
renvoi 5 de
tes lettres .)
. Ma chère petite femme
. Hier je n’ai pas reçu de lettre, sans doute qu’aujourd’hui
j’aurai la joie de te lire. Hier soir nous sommes allés faire
un exercice de bataillon, nous sommes rentrés assez bonne
heure et ça n’a pas été trop pénible. Ce matin nous
avons revue d’effets, de souliers et d’armes. Il faut que
nous soyons propres, il nous faut donc brosser, cirer
et fourbir et il y a beaucoup de chance pour qu’après
la soupe ils nous mènent nous salir à nouveau.
Il a gelé très fort cette nuit et il fait très froid ce
matin, aussi ce n’est pas commode pour écrire.
j’ai les pieds et les doigts gelés. Je crois que nous
ne tarderont pas à remonter aux avants-postes et
dans un secteur plus dangereux qu’où nous étions.
Enfin ! Espérons que la chance nous sera favorable
et que tout ce passera pour le mieux. Mon cama-
rade Courtial est passé cuisinier, ça lui fait
bien son affaire. Il me charge de bien vous envoyer
le bonjour ainsi que Barnay et Giraud. Décidé-
ment il fait très froid ce matin, j’ai les pieds à la
glace. nous n’allons pas avoir chaud pour prendre
la garde de nuit dans les tranchées. Hier j’ai
écris au Louis et je lui demande qu’il me réponde
de suite et me dise la vérité ; pour moi je ne crois
pas qu’il lui soit arrivé quelque chose. Je m’arrête
je continurai tout à l’heure, il faut que je me prépare
pour la revue… Voilà la revue de passée mais
c’est bientôt l’heure de la soupe et il va falloir monter
le sac pour partir à l’exercice, nous ne risquons
pas de ne pas savoir quoi faire. Quelle vie !
Ma Jeannot chérie : je m’ennui bien loin de toi
Verso
loin de notre petite Zizou et de tous nos parents
qui nous sont chers. Quand serons nous à nouveau
réunis, comme nous serons heureux si je vous suis ren-
du. Je vous aime bien mes deux gosses et je suis bien
impatient de voir venir l’heureux jour du retour
près de vous. Malheureusement ce n’est pas encore fini
nous y passerons l’hiver et après l’hiver il y aura
peut-être quelque évènement décisif. Que de patience
et de courage il nous faut encore. Si encore on était
sûre d’en revenir. C’est bien long et les guignols
a force de servir finissent par casser, il faut qu’ils
soient bien solides pour résister.
Où sont donc nos beaux jours d’autrefois ? Comme
tout cela est loin. Quand notre bonheur nous sera-t-
il rendu ? Les nuits je rêve souvent à toi et à notre
Zizou, je suis très agité et je dors mal, je me réveille
souvent. Dans je le jour je songe à tout ce qui fût
notre bonheur, à toutes nos joie, à notre amour
je me demande si tout cela nous sera rendu et
si j’aurai le bonheur de voir grandir notre
gamine. Je vous aime bien toutes deux
vous êtes toute ma vie et tout mon espoir
Je vis dans l’attente de reprendre ma place
près de vous et de pouvoir travailler et faire
mon possible pour vous rendre heureuses.
Au revoir ma chère femme. Ton Simon
t’adore et t’embrasse bien fort sur tes lèvres
Souviens toi des 7 jours si courts. Mille bisettes
à notre petite Zizou que je suis heureux de savoir
bien portante et forte et dégourdie. Bien des
choses à chez toi et à chez moi. Bonne santé
et bonne chance à tous. Ton petit homme
tout à sa Jeannot et pour toujours.
Je t’aime bien…bien…bien
J’attend… Au revoir. Simon Collay
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