Recto
. 25 Novembre 1917
( en haut à gauche : Je / t’envoi /
un trèfle à / quatre. Je l’ais / bisé bien fort
en pen/sant à toi. Bise-le toi / aussi en pensant
à ton / Simon)
. Ma bien chère petite fenotte
Je viens de lire à l’instant tes deux
lettres du 20 et 21 courant avec beaucoup
de plaisir car je suis comme toi, quand
je n’ais pas de lettre de ma Nonot il me
manque quelque chose.
. Tu me dis que notre Zizou se porte bien
mais que le pain qui vous est vendu a
Moingt lui met des coliques. Heureuse-
ment que les pastille que t’as remi le
pharmacien, lui font du bien. C’est tout
de même bien embêtant que vous ayez du
si mauvais pain ; si la guerre dure encore
longtemps je me demande où nous en serons
et comment il faudra vivre. Ils arriveront
bien à nous faire manger du pain fait avec
de la sciure de bois. Pour comble tu me
dis que ton travail ne marche pas des
mieux, les machines se détraquent. Il faut
toujours quelque chose pour gâter un peu
plus une situation guère brillante. J’espère
que ça été réparé et qu’il t’est possible
de gagner ta journée, car je crois qu’il ne
fait pas bon rester sans rien faire au prix
que sont toutes les marchandises, tous
les vivres.
. Tu me dis que la femme de Joanny est
son nouveau-né se portent bien. Tant
mieux ! La pauvre n’a guère besoin d’être
malade, je ne la vois pas fixe avec ses
deux gosses. Enfin ! Espérons qu’elle saura
se tirer d’affaire. Si encore Joanny reve-
Page 2
nait qu’il puisse gagner une journée. Il est
vrai que la Claudia a presque autant de bénéfice
avec l’allocation car mon frère n’est guère débrouil-
lard pour gagner une bonne journée. Ça fait
rien… ce n’est pas le rêve.
Georges, me dis-tu, n’a pas encore sa
croix de guerre, on lui la donnera en rentrant
de perm. Tu me dis que s’il l’avait eu, il
aurait été assez content de la porter car il est
assez fier et prétentieux, que c’est un petit gas
qui aime assez poser. Je ne sais pas ce qu’il
est exactement, pourtant ce que tu me dis,
m’étonne, pour moi je ne crois pas qu’il au-
rait porté sa décoration s’il l’avait eu. Il est
jeune, il est fier, c’est possible. Je le suis été
aussi mais j’ais toujours eu la force de mes opi-
nions. J’aurais la croix de guerre, j’en serais heu-
reux pour les deux jours de perm, mais je ne
la porterais pas. Il y a trop de gens qui ne la
méritent pas qui la porte et il y en a d’autres
qui l’ont gagné et qui ne l’ont pas. Et puis ce
qu’il nous manque ce n’est pas des médailles
c’est la Paix. Cette paix que nous attendons
depuis si longtemps vainement. Malheureuse-
ment la bande d’ambitieux et de goinfres qui
nous gouvernent se fichent totalement de nous.
Ils font leurs petites affaires.
. Rien de nouveau depuis hier. Aujour-
d’hui nous avons la pluie, bien vilain
temps. Notre artillerie n’a pas cessé de
la journée, il a dû sans doute se passer
quelque chose à notre droite ou à notre gauche
Quoi ? … Nous ne savons pas encore. Les
bôches nous bombardent quelque peu, il ne
faudrait pas que ça s’aggrave et qu’ils
nous fassent comme l’autre jour. Nous
sommes toujours au même endroit. Je
n’ais pas bougé de notre cagna car moi
je ne peux pas dire que le secteur est
calme, il s’en manque de beaucoup.
Je crois que demain soir nous allons dé-
ménager d’içi pour nous rapprocher
Page 3
des avants-postes. il n’y a encore rien de sûre mais il
faut s’y attendre. Je me demande quand ils nous sorti-
ront d’ici. Tu peux croire que nous attendons tous avec
beaucoup d’impatience. Il y en a mare … bien mare.
. Au revoir ma Jeannot des bois. Embrasse bien
notre petite zizi pour son papa. J’attend sa lettre, il
me tarde de la déchiffrer, je crois que j’aurai du travail
Bien le bonjour à ta mère, a chez moi, a toute la
famille. Vivement que j’ais la joie de tous vous revoir
je m’ennui bien loin de vous.
. A demain Mamie chérie. N’oubli pas ton petit
mari qui pense à toi constamment. Je t’aime de
tout mon cœur plein de toi et je t’envoi mes plus douces
caresses et mes plus tendres baisers. Je t’adore Ma-
mour .. sois toujours toute à moi ; j’ais besoin de
toute ta tendresse, de tout ton amour. Je serais
trop malheureux s’ils venaient à me manquer.
Je t’embrasse bien fort sur tes lèvres, partout. Tu
sais ! … Rappelle-toi la permission déjà si loin.
Quand nous reverrons-nous à présent ? Que l’atten-
te est longue et cruelle. Je t’adore. J’attend impa-
tiemment. Ton Simon tout à sa Nonot qui est
toute sa vie . Collay
Laissez votre message