. 25 mars 1916
. Ma Jeannot chérie
(Signature en haut à gauche)
Ce matin on nous a menés à l’exercice, à dix heures
au rapport on nous a lu que nous aurions exercice cet après-
midi de 3 heures à 5 et le soir de 7 à 8. Maintenant il
est 11 heures et on vient de nous avertir de monter tout notre
fourbi et de nous tenir prêts à partir pour 2 heures.
On dit qu’on va embarquer, mais on ne sait pas du
tout pour quel endroit. Retournerons nous où nous étions,
je ne sais. Je m’attendais à un coup de ce genre : je me
doutais bien que l’on ne nous laisserait pas longtemps
tranquil. Quelle vie tout de même. Quand donc
prendra-t-elle fin ? Quand serons-nous enfin réunis ?
C’est bien long ! Et rien ne nous fait espérer que ce sera
bientôt la fin. On parle que nous embarquerions en
autos. Si c’est vrai il y a des chances que nous re-
tournions où nous avons tant rôté. Mais je crois que
jusqu’au dernier moment personne ne saura rien
de précis. Je crois même, pour ma part que nous se-
rons embraqués en chemin de fer. On vient de faire la
distribution des lettres, aujourd’hui je n’ai de nouvelles
de personne et si on part je serai plusieurs jours
sans vous lire. C’est rudement embêtant. Quel commerce
Vivement la paix ! Pas de pluie aujourd’hui : un
pâle soleil pas trop chaud. On commence à nous harceler
il faut nettoyer le cantonnement avant de le quitter. On
va distribuer des vivres pour un jour de chemin de
fer et pour deux jours de débarquement. Les bruits les
plus contradictoires circulent pour l’endroit où nous de-
vons être embraqués ou plutôt débarqués. Je ne sais quand
ma carte te parviendra, car je ne sais pas trop quand elle
pourra partir. Au revoir ma Jeannot chérie
Ton petit homme t’embrasse bien tendrement
en attendant l’heureux jour. Bien des choses a
tous les parents. Mille bisettes au Zizou.
Ton Simon tout à toi et qui t’aime de toutes
son âme. En espérant te lire le plus tôt possible
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