Recto
Votre 22 janvier 1915
Simon
Collay
Ma Jeannot chérie
Je viens de recevoir ta gentille carte du 17 et
ta lettre du 18. Je suis heureux de recevoir
ta correspondance régulièrement, cela me rend
plus calme, c’est si dure de rester sans nouvelles
de ceux que l’on aime. Je suis content de voir que
personne de la famille n’est malade et que la
vie pour vous est toujours facile, que notre
chère enfant, notre gentille Zizou profite toujours
elle doit être bien drôle et comme tu me le dis le
temps me dure en effet de vous revoir, de repren-
dre ma place près de vous de pouvoir, Enfin !
avoir à nouveau vos caresses après lesquelles je
languis toujours de plus en plus. Mais hélas !
le jour heureux du retour n’est pas encore pro-
che, tout prouve le contraire, rien ne fait espé-
rer une prompte solution, il nous faut encore
beaucoup de courage et de patience avant
Centre gauche
d’êtres heureux. Espérons toujours, espérons
un évènement imprévu qui changera la
situation. Il est vraiment embêtant de ne
rien pouvoir savoir de précis au sujet de
ton frère, c’est long en effet, mais il existe
tellement de situation compliquées qu’il ne
ne nous est pas permis de désespérer, peut-être
un jour recevrons-nous de bonnes nouvelles.
Bien le bonjours à ta mère ainsi qu’a
toute la famille. Dans ma lettre d’hier
je t’ai fait savoir que mon frère Louis
avait vu ton cousin Chassagneux, il
doit le revoir un de ces jours. Hier nous
n’avons pas été couché dans les tranchées,
nous sommes restés au chaud. Je ne sais
pas encore ce que nous ferons aujourd’hui
et si nous resterons longtemps où nous sommes
je ne le pense pas, je crois plutôt que nous allons
retourner aux tranchées d’avants-postes.
Ici nous avons régulièrement la pluie, les
nuits sont froides, c’est un vilain temps pour
Centre droit
ceux qui habitent habitent les tranchées,
je suis étonné que le nombre des malades ne
soit pas plus élevé, je m’étonne moi-même,
d’être encore debout après tout ce que j’ai en-
duré, certe je ne suis pas fort mais le mo-
ral est encore plus malade que le physique
cette maudite guerre se prolonge tout à fait
trop. Depuis bientôt six mois je vous
ai quitté je ne vous ai plus revu, comme les
jours me paraissent longs, parfois je ne puis
m’empêcher de réfléchir à ma situation, ce
que je souffre alors, j’en suis anéanti et sans
forces, décidément la guerre est bien trop
cruelle. Heureusement que mes camarades
me tire de ces tristes réflexions on tâche de
se remonter un peu les uns les autres, on tâ-
che d’espérer à nouveau. Décidément c’est
bien dure ; quand nous reverrons nous ? hélas
nous n’en savons rien c’est qui m’ennui
le plus. La destinée nous sera-t-elle fa-
vorable ? nous n’avons que l’espérance pour
Verso
nous répondre. Patience ! Oui patience !
mais comme c’est long et pénible. Enfin !
Ma Jeannot, ma chère femme je t’ai-
me autant qu’il est possible d’aimer,
à présent plus qu’autrefois je m’apperçois
combien notre amour est enraciné dans nos
cœurs. Je ne puis comprendre la vie sans toi, sans
notre chère enfant notre vivant souvenir de ce
passé si doux si plein de charmes. Au revoir !
mes deux gosses. J’attend toujours de vos nouvelles
Bien des choses à l’oncle et à mes pa-
rents ainsi qu’à ta mère. Au plus tôt de
vous revoir tous . Je vous aime.
Bien le bonjours au frère de mon camarade
si vous le voyez. Mon copain vous env
envoi ses salutions et une franche
poignée de mains.
Je t’ai renvoyé quelques-unes de tes cartes
mes poches étant trop pleines. Tu me feras
savoir si tu les as reçues. Je les ai mise
au bureau ce matin
signature en haut du recto
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