Recto
. 1er Novembre 1917
. 4 heures du soir
( en haut à gauche : Je te/ renvoie 3/
De tes cartes / et une de tes/ lettres )
. Chère petite femme
J’ais reçu hier soir ta lettre du 27
ecoulé et la carte que tu m’as envoyé
de St Etienne. Dans ta lettre tu me
dis que la poitrine me fait mal mais
ce ne devait pas être grand-chose puis-
que ça n’a pas retardé ton voyage pour
St Etienne. Tu te plains de ton travail
ça ne marche pas et tu serais contente
que Berger te fasse appeler, moi aussi
car je ne suis pas bêtement jaloux, ni
je ne doute pas de toi mais je préférerais
qu’il n’y ai personne pour rôder au-
tour de tes jupons. Il y a une chose
qui m’étonne, tu es allée à St Etienne
cela n’a rien d’extraordinaire, mais
pourquoi y être allée avec cette Claudia
puisque toi-même tu m’as dis qu’elle
n’était pas sérieuse. Comprend que cela
ne peut guère me faire plaisir, je ne veux
pas te dire de la rembaler, ni je ne veux
Centre gauche
pas t’empêcher de lui causer mais je
serais content que tu n’aies pas trop
d’intimité avec cette jeune fille et ça
ne me fait pas plaisir de te voir faire
les voyages avec elle. Toi-même tu
m’as dis que sa conduite n’était pas
irréprochable, dans ce cas tu dois com-
prendre que ce ne peut-être une amie
pour toi. Ne te fache pas de ce que
je te dis, réfléchis et tu me diras si tu
pense que j’ais tort ou si j’ais raison
Pour ce qui est du rêve que tu as fait
dans lequel j’avais une maitresse blon-
de que je t’imposais. Tu peux être
tranquille, je n’ais pas d’autre femme
que la mienne que j’adore, je n’en
cherche pas d’autre ; du reste en ce mo-
ment j’ais autre chose à penser. Tu
me dis que tu n’étais pas jalouse, que
tu fermais les yeux. Et bien … Tu sais
je ne m’y fierais pas. Je n’ais jamais
eu l’intention de te tromper, mais
je l’aurais eu que je n’aurais certaine-
ment pas essayé de t’imposer la présen-
ce de ma maitresse. Tu n’es pas une
petite femme à supporter pareille chose
Je te connais peut-être plus que tu ne te
connais toi-même ; tu ne partagerais
pas si facilement que ça.
. Ma Nonot chérie. Pas grand-
chose à t’apprendre depuis hier ; nous
sommes toujours dans le même coin
Cette nuit et aujourd’hui jusqu’a
présent, les bôches nous ont foutu
la Paix. Est-ce que ça durera ? Il
le faudrait bien, nous avons assez
de mal comme cela. Aujourd’hui
Centre droit
il fait beau temps. Le soleil se fait voir
malheureusement nous ne pouvons
guère en profiter car on ne peut sortir
de nos trous le jour, nous sommes vu des
bôches et il y a de nombreux avions au
dessus des lignes. Il nous faut rester assis
toute la journée, les fesses et les reins
m’en font mal. Ça ce n’est rien, j’aime
mieux rester assis et que les bôches nous
laissent tranquils. Vivement qu’on nous
sorte de par ici, malheureusement je
crois que nous avons quelques jours à y rester
Quelle existence ! Elle ne finira jamais
cette maudite guerre ; ce qui ce passe
en Italie n’est pas fait pour hâter la
Paix. Que de patience il nous faut.
Bien chère petite fenotte. Notre Zizou
se porte toujours bien et elle veut une
poupée, tu dois lui l’avoir acheter a
St Etienne elle devait-être contente ; mal-
heureusement la poupée sera vite désar-
ticulée, elle aura tôt fait de lui casser la
tête, les bras ou les jambes… Elle parle
toujours de son père, elle ne m’a pas
oublier et elle t’a disputé parce que
tu m’as laissé partir. Hélas ! Nous ne
désirons pas être séparés. Malheureu-
sement que nos désirs ne peuvent êtres
exaucés sans quoi je ne tarderais pas
d’être près de mes deux gosses chéries loin
desquelles la vie m’est insupportable.
Vivement… bien vivement l’heureux jour
de la Paix et que la chance ne nous
abandonne pas jusque là. Nous se-
rions si heureux tous les trois avec notre
petite Zizi. Quel bonheur serait le notre
comme je saurais bien vous aimer
toutes deux. Mais voilà ! il faut atten-
dre toujours attendre et toujours vai
Verso
nement. Bienheureux encore si notre
attente est récompensée. Espérons-le
que de fois nous nous le sommes répétés
ce mot-là. Voilà 39 mois que nous vivons
séparés, 39 mois de souffrances morales et
physiques. Ce serait bien temps que ça
finisse.
. Au revoir Mamour à demain.
J’attend avec impatience de te relire
pour savoir comment ton voyage se se-
ra passé. Surtout ne te fache pas pour
ce que je t’ais dis au sujet de ta ca-
marade d’atelier, qu’elle soit cela
mais pas ton amie. Embrasse bien
fort notre gamine pour moi. Donne
bien le bonjour à ta mère, j’espère
qu’elle se porte bien de même que
toute la famille. Bien des choses
à chez moi si tu les vois. Je n’ais
toujours pas de nouvelles du Georges
je suis inquiet il me tarde de le
lire pour savoir comment il s’en
sera tiré. Bien ! je le souhaite et
l’espère.
. Ton petit Simon entièrement
à sa Jeannot des bois qu’il aime
plus que tout au monde avec sa
petite gamine de Zizou. je t’em-
brasse bien tendrement des mil-
lions de fois partout ! comme
pendant les nuits de la perm si
vite passée. J’étais bien près de
toi. Je suis bien mal à présent
et les jours sont affreusement
longs. Ton petit homme qui ne
cesse de penser à toi et t’envoi
ses plus douces caresses. Je t’ai-
me ! J’attend ! N’oubli pas.
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