Recto
. 1er juillet 1917
( en haut à gauche : Ton/Simon/
Collay )
. Ma Jeannot chérie
Je ne t’ais pas écris ni avant-hier ni
hier. Comme je m y attendais nous
avons embarqué avant-hier matin
Le train s’est mis en marche vers
les deux heures de l’après-midi, nous
avons roulé le restant du jour, toute
la nuit et nous avons débarqué hier
matin vers 6h1/2. Nous n’étions pas
du tout à notre aise dans ce train
nous étions 56 dans un wagon a
bestiaux, nous étions empilés comme
des ballots ; faut croire que nous som-
mes considérés pour peu de chose.
. Pour comble en débarquant il
nous a fallu nous appuyer 17
ou 18 kilomètres à pieds. Il y a
longtemps que je n’en avais pas
autant rôté. J’étais complète-
ment fourbu : mal aux pieds,
mal au cœur, toute la lyre quoi.
Mon linge et ma capote étaient
aussi mouillés que si j’étais resté
une demi heure dans l’eau.
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Heureusement qu’une fois arrivés dans
le village où nous sommes cantonnés nous
avons pû nous procurer, en payant lar-
gement, du vin et une salade. Nous
avons bu un bon coup, je ne pouvais
arriver à me désaltérer. Je n’ais ja-
mais eu si soif.
. Nous avons donc changé de secteur
nous sommes bien plus à la droite du
front. Nous sommes cantonnés dans
un petit village à une trentaine de
kilomètres à l’arrière du front. Nous
resteront peut-être un jour ou deux
par ici, après quoi j’ignore où nous
irons.
. Cette nuit j’ai bien dormi mais
ce matin en me levant les reins et
la tête me faisaient mal, et tout en-
core à présent ; la fatigue n’est pas
entièrement passée et de temps en
temps je ressens quelques piquées a
mon bras droit.
. Aujourd’hui nous avons un temps
sombre, il pleut quelque peu. Hier
il faisait très chaud, il aurait été pré-
férable que nous ayons eu le temps
d’aujourd’hui, la marche aurait étée
moins pénible.
. Et toi ma Nonot que fais-tu ?
Je n’ais encore rien reçu de toi.
Peut-être qu’aujourd’hui on nous
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distribura des lettres et il me sera possible
de te lire. J’attend avec impatience. Ah !… ça
n’est plus les 7 jours heureux vécus près de
toi. Quelle différence. Enfin ! il faut se rési-
gner puisque nous sommes pas assez homme
pour faire autre chose.
. Au revoir Mamie chérie. A demain
J’attend avec impatience une lettre de toi.
. Bien le bonjour à ta mère, à mes parents
car je n’ais pas le courage de leur écrire
aujourd’hui. Je veux me recoucher un mo-
ment car tout à l’heure il va y avoir revue
de cantonnement et douche. Embrasse bien
fort notre gentille petite Zizou pour son
papa qui pense à vous continuellement
et qui vous envoi ses plus douces caresses en
attendant toujours l’heureux jour qui nous
réunira.
. Ton petit mari qui t’adore et qui t’embrasse
des millions de fois bien fort sur tes lèvres, com-
me pendant les quelques jours si vite passés
Je t’aime bien…bien…Rappelle-toi ! Souviens
toi !… Sois toute mienne !
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