Recto
13 janvier 1915
Ma Jeannot chérie
Hier je n’ai pas eu la lettre de toi ni je
ne t’ai pas écris car il fallu se préparer pour
monter aux avants postes. Ce matin nous
sommes partis à 5 h du matin : nous sommes
aux avants postes pour une quinzaine de
jours. Nous sommes affreusement mal
logés dans de petites cahutes construites de-
puis les débuts ; c’est très sale partout de
la boue ; nous couchons sur de la paille
pourrie où doivent habiter quantité de
Verso
vermines de toutes espèces. Le moindre obus
[ ] torpille raserait notre abri comme[ ] .
Il y a bien longtemps que nous
avons été si mal. Aussi j’ai le noir horri-
blement, décidément la vie n’est pas belle je suis
complètement dégouté. Quand donc ça finira-
t-il ? Décidément c’est trop bien trop !
Petite femme : avant-hier soir à 7 h on
m’a remi le colis que tu m’as expédier. Ils
étaient en très bon état le saucisson était
bien bon le fromage aussi, surtout le fromage
m’a fait beaucoup plaisir. Ici nous ne
trouvons rien et le peu que nous trouvons est horri-
blement cher. Il y avait aussi des [palmers ?]
et des cartes lettres dans le colis. Merci
bien à mon père pour le saucisson
L’ordinaire n’est pas abondant et je suis a
me demander ce que notre compagnie comman
dant de compagnie peut bien faire des 20 centimes
qui nous sont alloués pour l’amélioration
de l’ordinaire, ainsi que les prêts retenus aux
punis de prison. Nous n’en sommes pas content
de notre lieutenant, s’il y a des chefs qui savent se
faire aimer ce n’est pas lui. Que faire ? Rien !
Nous n’y pouvons absolument rien. Il nous faut
supporter et se soumettre comme de véritables
esclaves que nous sommes ; nous ne sommes pas
Traités comme des hommes, n’y même comme les
enfants mais complètement comme des forçats,
des bagnards. Pour faire un bon soldat il faut être
complètement dépourvu d’intelligence et obéir
tel une brûte domptée. Voilà la belle vie qui nous
est faite. Quand finira-t-elle. Tu peux faire voir
ma lettre. On ne le saura jamais assez à l’arrière
oui on a l’air de nous ignorer. Nous sommes retranchés
de la vie civilisée et ces messieurs ont l’air de le trou
ver tout naturel. Enfin ! Patience…qui vivra
verra. Au revoir chère petite femme. Embrasse
bien fort notre enfant pour moi. Bien des choses
à toute la famille et n’oubli pas que je t’aime
Ton Simon qui t’embrasse bien fort . Souviens toi
signature au recto à gauche des fleurs, verticalement.
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