Recto
. 29 juin 1918
. Ma petite fenotte bien-aimée
Je viens de lire avec beaucoup de plaisir tes deux
lettres du 23 et 24 courant. Je suis bien content
quand je puis lire de bonnes nouvelles de mes deux
gosses chéries. Tu me dis que notre Zizou que porte tou-
jours bien, elle a bien grandit mais elle a maigrit,
elle est toujours bien diable et ne peut rester en place
il faut toujours qu’elle se remue, ce n’est donc pas étonnant
si elle n’est pas grasse. Ce qui est embêtant c’est que
le pipi au lit au lit ne passe pas ça devient ennuyeux, il fau-
drait pourtant arriver à la guérir. Mais comment ? …
on ne sait qu’y faire.
. Vous avez à nouveau le beau temps. La vigne
me dis-tu est jolie, seulement les vers se sont mis
aux raisins. Il faut toujours qu’il y est quelque chose
qui aille de travers. Espérons que ce ne sera rien
et que la vendange ne sera pas compromise.
. Pour moi la santé est toujours bonne
mais je suis fatigué. Nous nous sommes mis en
route la nuit passée à minuit et demi. Nous
sommes arrivés à destination vers les 5 heures du
matin. On a bu le jus et le bouillon et on s’est
couché sur la paille dans une écurie. Nous som-
mes dans un village mais cette nuit nous redé-
ménageons à nouveau et nous montons de nou-
veau en ligne. Nous avons tout simplement
changé de secteur. Espérons qu’ici tout se passe-
ra du mieux possible, que les bôches nous fiche-
ront la Paix et que de notre côté on ne nous force-
ra pas aller les embêter. Nous avons beau
temps nous autres aussi, il fait soleil.
. Je suis fatigué car je n’ais guère dormi. Je me
Verso
suis couché à 6 heures à dix heures il a fallu man-
ger la soupe. J’ais mal aux pieds et je veux me
recoucher à nouveau pour être dispo pour faire
la route ce soir.
. Mamour. Tu me parle d’un camarade
de ma compagnie qui a été blessé au coup de
main que nous avons fait à Avocourt et qui est
en traitement à Vichy avec Morel. J’ais vu
la lettre que Morel a écrit au Louis. Je connais
très bien le copain en question car c’est un ancien
de ma compagnie. Mais ce n’est pas moi qui l’ais
panser, ni un autre brancardier de la compagnie
pour la bonne raison que qu’il est parti tout
seul au poste de secours. Nous ne l’avons même
pas vu. Il a été blessé au coude et comme de juste
il s’est dépêché de sortir de la zône dangereuse.
C’est un brave garçon, un bon type.
. Au revoir petite fenotte. A demain
J’espère que je pourrai te lire à nouveau et toujours
en bonne santé. Embrasse bien fort notre gamine
pour moi et donne bien le bonjour à ta mère, a
chez moi, à toute la famille. Bonne santé et
bonne chance à tous et vivement que j’ais la joie
de vous revoir tous. J’attends avec beaucoup d’im-
patience … Malheureusement il n’y faut pas compter
de sitôt. Pas même le mois prochain. On père lui
aussi m’a écrit qu’il comptait me voir bientôt a
présent que les permes avaient reprit. Malheureu-
sement ça ne marche pas vite et elles ne tarde-
ront certainement pas à être supprimées à nouveau
car il faut s’attendre à une nouvelle offensive
bôche. Enfin ! … Il faut prendre comme ça vient
quoique ça soit bien dure et bien cruel.
. Au revoir ! Ton petit mari entièrement
à toi et qui t’envoi de bien douces caresses et t’em-
brasse bien fort comme pour la perme déjà si loin.
. Je t’adore et pas un instant je ne cesse de penser
à toi et à notre gentille Zizi.
. Ton Simon Collay
Laissez votre message