Nous avons un manque dans nos sources pour le premier trimestre de l’année. Nous savons que Simon écrit tous les jours et ce manque peut s’expliquer par des pertes mais on peut émettre d’autres hypothèses pour la période qui va de fin février à mi-mars.
Nous savons, par Jeanne[1] que Simon a écrit les 1, 3 14,16 et 17, le rythme quotidien est donc rompu. Dans l’autre sens aussi le rythme semble différent, elle précise dans celle du 21 : « je suis fort étonner que tu es rester si longtemps sans rien recevoir ». Elle incrimine l’acheminement du courrier, dans les deux sens. Simon lui écrit les 18,19,20. Nous n’avons pas ces lettres mais il doit se plaindre de l’absence de lettre puisque Jeanne lui précise qu’elle en a envoyé 2 entre le 9 et le 14. Des interrogations donc, mais le journal de marche du 38ème suggère une autre possibilité :
Le 23 février 1916, la division fait mouvement et embarque à la gare de Montdidier. Les 3 bataillons du 38e partent de cette gare à partir de 23 heures, les deux autres suivant à 3 heures d’intervalle.
Le 25 ils arrivent à la gare de Givry en Argonne (sans précision d’heure)
Le lendemain le 38ème et le 86ème se mettent en marche pour aller dans la région de Verdun , environ 60 kilomètres qu’ils parcourent en 3 jours. Ils cantonnent le soir du 28 à Belrupt, les 2ème et 3ème bataillons sont logés dans des péniches.
On leur accorde une journée de repos le 29.
Le 1er mars Ils se rendent à l’arrière de leurs futures positions avant la nuit, entre 5 et 10 kilomètres.
Dans l’ordre de bataille qui figure dans le journal de marche, Simon fait partie du 3ème bataillon, le bataillon Julien (c’est ainsi qu’il est désigné pendant les quinze jours qui suivent), il fait partie de la 11ème compagnie , sous les ordres des lieutenants Carrez et Dragol.
Le deuxième bataillon est affecté autour du village d’Eix tandis que le 3ème occupe les tranchées de la cote 254, de la Fièveterie et de la Barricade. Cette dernière position est celle de la 11ème compagnie à laquelle on adjoint une section de mitrailleuse. Nous n’avons pas trouvé la localisation de ces lieux mais on repère sur la carte, la cote 254 et le lieu-dit « la Fièveterie au nord-est d’Eix.
Aucun repère en revanche sur la tranchée de la Barricade, qui se situe peut-être plus au nord. De toute façon on est là dans des distances de quelques dizaines de mètres, la limite nord du bataillon est donnée par le ruisseau de Tavanne
Une carte actuelle est peut être plus lisible…
La cote 254 est en avant de la Fièveterie, le ruisseau de Tavanne coule au nord de la voie ferrée.
Le secteur est très disputé : bombardement intensif des cotes 250 et 254, les Allemands sont en position sur les pentes est de ces repères. Les hommes sont chargés de renforcer les organisations défensives. Les liaisons entre tranchées sont rendues très difficiles.
Le village d’Eix est bombardé avec des obus de gros calibre. Le bataillon Julien est chargé de faire des boyaux et des sapes de liaison entre les tranchées défensives, constamment bouleversées.
A l’avant de la tranchée de la Barricade, un ouvrage situé à environ 200 mètres est occupé par l’ennemi. La cote 254 est un enjeu pour les deux armées : bombardement intense sur la position, survol « en toute liberté » par une escadrille allemande, soit pour constater l’état des lieux soit pour ajuster les tirs….
L’importance de conserver cette position haute permet d’observer les mouvements ennemis : « les guetteurs de la cote 254 signalent l’exécution de travaux à la ferme de Souppléville ainsi que le creusement de tranchées au bois de Cognons, à l’ouest de la route d’Abaucourt à Moranville » Ces objectifs sont situés entre 1 et 2.5kilomètres du point d’observation[2].
Dans le même temps, un autre bataillon du 38ème et une compagnie du 86ème sont envoyés en renfort au Fort de Vaux. Le commandant Belléculée en reçoit le commandement le 9 mars.
Le jour suivant, les bombardements sont continus et violents, l’ennemi attaque plus au nord, il est repoussé.
Le 11, c’est la positon 254 qui est visée : le bombardement est le prélude à une violente attaque. Les obus démolissent une tranchée, les hommes sont ensevelis sous les parapets. Deux sous-lieutenants disparaissent, un capitaine est fait prisonnier mais réussit à rejoindre les lignes.
Une contre-attaque, avec préparation d’artillerie, échoue à reprendre le territoire perdu, elle cause de lourdes pertes et recule de 150 mètres. Une tranchée est creusée à la hâte pour interdire toute nouvelle avance. Le bilan est lourd : 3 officiers blessés, 2 disparus, 5 hommes tués et 40 disparus.
En outre deux mitrailleuses ont été perdues, enfouies dans les tranchées bouleversées.
Le 12, le bataillon est chargé de remettre en place les défenses en retrait du secteur perdu, cela se fait en direction du nord de la Fiéveterie.
Les bombardements sont continus sur ce secteur.
Le 13 mars, le bataillon Julien projette la reprise de la cote 254, l’état-major l’autorise puis finalement suspend à cause de la relève.
Le 14, les travaux de consolidation de défense sont poursuivis et l’ordre de relève est confirmé pour la nuit suivante. Le 415ème régiment remplace le 38ème dans ce secteur.
La relève se fait sous un intense bombardement vers 3 heures du matin. Un lieutenant est tué ainsi que plusieurs hommes du bataillon. Le bilan de ces journées est lourd : pour les 3 bataillons il y a 51 tués, 172 blessés et 112 disparus, hommes et officiers confondus.
Ils sont envoyés en cantonnement à la caserne Bévaux, à Verdun, puis le lendemain ils sont acheminés en automobiles au sud de Bar le Duc et cantonnent à Morley, Dampierre sur Saulx, le 3ème bataillon est quant à lui à Villers le Sec.
A la date du lendemain, le 17 nous avons un courrier de Simon.
Ils restent dans ces cantonnements jusqu’au 21 mars. Ils sont regroupés sur Saint Dizier.
[1] Jeanne, lettres du 12 et 21 mars 1916.O du 38ème RI au 7 mars.
[2] Mémoire des hommes, JMO du 38ème RI au 7 mars.
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