Ma Jeannot chérie

Correspondance d’un soldat de la guerre 14-18

  • Accueil
  • Le projet
    • Une rencontre, un projet
    • Démarche
  • Toutes les lettres
    • Correspondance Simon
    • Courrier Jeanne
    • Documents
  • Contact

14 novembre 1916 : où s’arrêteront nos douleurs morales et physiques ?

14 novembre 2016 Laisser un commentaire

Recto

J’attends impatiemment que le vaguemestre soit arrivé

J’étais inquiet et triste

.                           14 novembre 1916
.       Ma Jeannot chérie
Décidément je suis inquiet je n’ais encore
rien reçu de toi hier ça fait trois jours.
Comment se fait-il ? Est-ce encore un retard
de correspondance ? C’est bizarre tout de même !
C’est surtout bien embêtant et je suis bien en-
nuyé ; je ne suis pas tranquil du tout. J’attends
impatiemment que le vaguemestre soit arrivé, il
me tarde de savoir si aujourd’hui il me sera
possible de te lire et d’avoir des nouvelles de ceux
qui me sont chers. Cette nuit je suis été très énervé
je n’étais pas tranquil. J’étais inquiet et triste
comme à l’approche d’un malheur. Pourquoi ?
Que se passe-t-il donc ? Il me semblait que notre
amour était menacé. Serais-ce vrai ? .. Non
ce n’est pas possible – pas petite femme- C’est
idiot que de pareilles idées viennent à l’esprit
pour vous enlever toute tranquilité et vous ren-
dre malheureux. C’est fou ! … Et pourtant il se
passe tellement de vilaines choses ; on supporte
tellement l’adversité que l’on se demande jusque
où ira notre malheur, où s’arrêteront nos douleurs
morales et physiques.

 

 

Centre gauche

Je t’adore de toutes mes forces et je souffrirais trop de ne pas être payé de retour.

Ton amour est tout pour moi

Cette nuit j’ais pensé a une chose que tu m’as
dis en permission, une chose qui m’a fait de la
peine sans que tu t’en doute, car en me le disant
c’était me faire comprendre que tu n’avais pas
entièrement confiance en moi.
Un jour ou plutôt un soir que j’étais sorti avec
Adolphe, je t’aurais dis que si j’avais eu de l’ar-
gent  je me serais payé une femme. Comme je
te l’ais déjà dis, je ne me rappelle pas de cela ; il
est possible que je t’ais causé ainsi pour plaisanter.
mais j’ais compris dernièrement en permission que
malgré ce que j’ais pu te dire tu continuais
à croire que je ne t’avais pas dis cela pour rire
et tu paraissais me croire capable de faire cette
mauvaise action. Pourquoi ça m’est-il revenu
à l’idée cette nuit ? Je ne sais et j’ais presque peur
que tu manque de confiance en moi. Pourtant
tu peux être sûre, ma Jeannot, que depuis que
je t’ais connue je n’ais jamais eu d’autre femme
et n’en ais désiré aucune. Je t’ais toujours aimée
malgré tout ce qui a pû se passer. Pourquoi
ais-je songé à cela cette nuit ? . Je ne sais…
tu vas me trouver fou de te causer ainsi mais
c’est plus fort que moi, ça m’est revenu à l’esprit
avec une persistance étrange. Je suis inquiet…
très inquiet. Ton amour est tout pour moi, ton
amour entier, sans arrière pensé. Je t’adore de
toutes mes forces et je souffrirais trop de ne pas
être payé de retour. je sais : tu n’as rien fais
pour mériter de reproches. Je crois que tu t’es tou-
jours conduite comme une honnête mère et épouse
mais j’ais vu cette nuit comme une menace
dans le doute, dont tu as fais preuve à mon

 

 

Centre droit

J’étais bien peiné et bien inquiet de ne pouvoir te lire

Nous avons fait à peu
près 17 Km

égard. Je t’ais toujours aimée entièrement et
sans partage et je voudrais que tu me crois
et que j’ais toute ta confiance. Ne m’en veux pas
de te causer ainsi. Je suis franc, sois franche a
à mon égard. Je ne te dis pas celà pour te faire
de la peine. Je te le dis parce qu’il me semble
que c’est nécessaire. Je ne puis comprendre pour-
quoi ; il y a des choses que l’on ne s’explique pas
Hier je ne t’ais pas écris car à midi nous som-
mes partis en marche ; nous avons fait à peu
près 17 Km et nous sommes rentrés à la tombée
de la nuit, le vaguemestre était parti, il m’était
donc impossible de t’écrire. J’étais bien peiné et
bien inquiet de ne pouvoir te lire, moi qui en
toute confiance demandais tes lettres aux cama-
rades qui n’avaient pas marchés. Point de lettre ! …
tu ne peux t’imaginer ma déception.
Aujourd’hui nous avons un temps eu sombre. Hier
soir et cette nuit il a plut quelque peu. Toujours
un temps bizarre… J’ais bien peur que notre
repos tire à sa fin et qu’il nous faille bientôt
reprendre les tranchées. Quand donc tout ce com-
merce sera-t-il fini ? que cette séparation est
pénible. Voilà plus de 27 mois que nous vivons
ainsi, loin l’un de l’autre, à attendre que nous
soyons à nouveau réunis, à désirer le retour de
notre bonheur et de jours plus heureux. Quand
ce supplice prendra-t-il fin ? Hélas ! … Qui
le sait… c’est toujours pareil et les massacres
se poursuivent… Enfin ! Soyons forts… tâchons
d’êtres le plus patients possible et que la chance
ne nous abandonne pas. Espérons. Attendons
l’heureux jour qui nous réunira pour toujours

 

 

Verso

Pas un instant je ne vous oublie et ne cesse de désirer d’être près de vous.

Vous êtes toute ma vie.

Je t’adore de toutes forces, de tout mon cœur
plein de mes deux gosses chéries, de nos gentils sou-
venirs d’autrefois. Je t’aime ! ma Jeannot des bois
je voudrais que tu me crois et que tu ais entièrement
confiance en moi, en amour qui est aussi grand
qu’il est possible qu’il soit. Toi et notre Zizou
vous êtes toute ma vie. Pas un instant je ne
vous oublie et ne cesse de désirer d’être près de vous.
J’attends impatiemment ! Je vous aime de toute
mon âme, de toutes mes forces.
Chère petite femme : je viens de recevoir à l’instant
Tes lettres du 9 et du 11 courant. Tu as encore étée fati-
guée, déciddément nous n’avons pas beaucoup de chance
Heureusement que ça n’a pas duré et j’espère que
tu ne t’en ressens plus du tout. Méfie-toi petite chérie
Vous avez mauvais temps et la route est longue
pour aller à ton travail. Tu te sens fatiguée
il ne faut pas te forcer, repose-toi ce sera préférable
que de tomber malade. J’attendais tes lettres avec
beaucoup d’impatience tu peux croire. Je suis content
de pouvoir te lire. Comme tu le dis : quand aurons-nous
fini de nous écrire, quand serons-nous réunis pour
toujours.
Je suis complètement remis de mon indisposition
Comme je te l’explique au début de ma lettre je n’ais
guère dormi la nuit passée. C’est fou ! Ca ne se com-
prend pas, mais c’était plus fort que moi. J’étais
très inquiet ne m’en veux pas ma Jeannot
tu ne peux croire ce que l’on souffre parfois. J’ais
toujours peur de te perdre, c’est que je t’aime bien
va ! Et puis j’étais inquiet, très inquiet.
Tu me dis que notre petit diable de Zizou coure toujours
les rues à tenant et que c’est très difficile de la garder
dans la maison ; elle saute, elle chante, elle est gaie
C’est de son âge et il vaut bien mieux ainsi que si elle
était malade. Tu me dis qu’elle aime bien les pilules
mais que ça ne lui fait guère de l’effet et qu’elle fait
pipi plus [que ?] jamais dans son lit. C’est bien embêtant
mais il faut encore continuer le traitement. Peut-être

 

___________________________________________________________________________________________

Cette lettre ne semble pas terminée, mais nous n’avons aucun feuillet supplémentaire.

 

Vous pourriez aimer lire ...

8 novembre 1916 : Plus ça va plus c’est terrible et meurtrier.
Jeanne 17 novembre 1916 : Toujours il y a quelque chose pour nous embêter

Vous voudriez me joindre ?

  • Vous avez des documents complémentaires?
  • Vous avez des questions?
  • Vous connaissez la famille de Simon?
  • Prenez contact avec moi !

Laissez votre message Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Ont participé à ce site, par ordre chronologique

- Jacques, collectionneur, a découvert le corpus de travail
- Anne, documentaliste, en a saisi l'importance et l'exploitation possible
- Philippe, enseignant en histoire, s'est engagé à les publier, décrypter, analyser, et à faire les recherches nécessaires à leur compréhension et interprétation
- Aniki, photographe, a fait les photos
- Kristof et JP, ont créé et codé le site.
- Brigitte, retraitée de l'enseignement, joue au webmaster

Le soldat Simon Collay

Portrait de Simon Collay

Simon Pierre Collay naît le 2 décembre 1888 à Montbrison. Son père, Pierre, est journalier et sa mère, Benoite Cote, est ménagère. Ils ont respectivement 27 et 25 ans. On ne sait rien de son parcours scolaire mais arrivé au service militaire, en 1909, il a un degré d’instruction générale évalué à 3. (Sur une échelle de 3.) Physiquement, il mesure 1 mètre 61, a les cheveux et sourcils châtains, il a le nez, la bouche et le menton moyen, le visage ovale. Il exerce le métier de plâtrier peintre. Il est incorporé au 38ème régiment d’infanterie de Saint Etienne, le 7 octobre 1909, sous le matricule 1264 et le quitte deux ans plus tard le 24 septembre 1911, muni de son certificat de bonne conduite. C’est ce même régiment qu’il rejoint lors de la mobilisation. Il se marie avec Jeanne Vachez le 14 janvier 1913, à Moingt. Ils ont une petite fille née peu avant la guerre. Sources : Archives Départementales de la Loire : 3NUMEC/3E148_40 et 47 NUM-1R1574 "

jeannotJeanne Vachez est née le  8 octobre 1891. Elle est la fille de François Vachez, maçon agé de 43 ans d’Antoinette Faverjon ménagère âgée de  33 ans. Ils demeurent  à Moingt (aujourd’hui intégré à la commune de Montbrison), dans le bourg. On sait peu de chose de sa vie avant la guerre : on peut supposer qu’à l’école la maitresse devait apprécier son écriture très belle , moins sans doute son orthographe…A moins d’un niveau très faible en calcul, , elle aurait  eu la mention 3 pour le degré d’instruction au  conseil de révision mais les femmes n’y allaient pas. Au recensement de 1911 elle est tisseuse chez Epitalon tout comme sa cousine Marie qui habite la maison voisine. Elle se marie avec Simon, le 14 janvier 1913, à Moingt , à quatre heures de l’après-midi. Les deux époux sont majeurs mais il est précisé qu’il se fait avec le consentement des parents. A ce moment là Jeanne est passementière. Il y a quatre témoins : Etienne, le frère de Jeanne, Joanny, le frère de Simon et deux amis du couple. Ils sont domiciliés à Montbrison, quai Saint Jean.

Avertissement

Suite à un problème avec notre hébergeur/serveur, le site a perdu les lettres du 14 juin au 31 octobre (43 courriers,). Nous allons rééditer ces correspondances dans les semaines à venir. Merci de votre compréhension.

Liens amis

  • Finderskeepers.fr
  • Correspondance de poilus
  • Chtimiste.com
  • Raconte-moi 14-18

Copyright © 2014 Philippe Maret | Mentions Légales